Article publié sur le site reporterre.net – Publié le 20 juin 2025.
Présents dans 2,5 % des foyers en France hexagonale, les ventilateurs de plafond, ou brasseurs d’air, sont une alternative économique et écologique à la climatisation. Mais tous les logements ne peuvent pas les accueillir.
Crèches, dortoirs d’écoles maternelles, cantine scolaire… Depuis deux ans, les enfants respirent un peu mieux lors des épisodes caniculaires à Vénissieux (Rhône). Dans cette ville exposée au phénomène des îlots de chaleur urbains — et où la température pourrait atteindre 37 °C dimanche 22 juin — la municipalité a installé des ventilateurs de plafond dans certains de ses bâtiments.
Objectif atteint : ces appareils qui brassent l’air ambiant réduisent l’inconfort quand le thermomètre s’affole. « Les retours sont positifs. Même le bruit n’est pas un problème dans les dortoirs : cela n’empêche pas les enfants de dormir, assure Cécile Wicky, directrice du patrimoine de la commune. Désormais, on commence à nous demander d’en installer dans les salles de classe. » Pour la collectivité, l’investissement est bien plus abordable que la climatisation : pour 90 000 euros, 150 appareils ont été installés dans une trentaine de bâtiments. Cette somme permettrait tout juste de climatiser une dizaine de salles.
Un exemple à suivre dans nos logements ? En tout cas, on aurait tort de croire que ces appareils appartiennent au passé ou aux pays tropicaux ! Alors que les défauts de la climatisation sont nombreux (rejet de la chaleur à l’extérieur, utilisation de fluides polluants et, in fine participation au réchauffement climatique), le ventilateur de plafond (ou brasseur d’air) peut constituer une alternative écologique et économique.
Un gain de 4 °C de température ressentie
D’un coût d’achat limité, il est aussi sobre à l’usage : « Un brasseur d’air consomme 25 à 40 fois moins d’électricité qu’une clim, pour un service rendu qui peut être comparable. C’est une solution low-tech, pleine de bon sens, qu’il faut découvrir ou redécouvrir », estime Robert Célaire, ingénieur bioclimaticien, ancien maître de conférences en école d’architecture.
« Le brasseur d’air permet un rafraîchissement en agissant non pas sur la température du thermomètre, mais sur la température effectivement ressentie par l’individu », poursuit Robert Célaire, également coauteur d’un guide très précis sur le sujet. Le courant d’air produit facilite l’évacuation de la chaleur par la peau, via le phénomène d’évapotranspiration.
« Une vitesse d’air de 0,8 m/s permet d’obtenir un gain de près de 4 °C de température ressentie dans des conditions courantes estivales », précise-t-on à l’Association française des professionnels du ventilateur de plafond (AFPVP), qui regroupe trois distributeurs spécialisés (Exhale Fans, Guibb et Turbobrise), qui se fournissent hors d’Europe. Cette efficacité est toutefois un peu moindre par temps très humide.
À la différence des ventilateurs sur pied, qui produisent un flux d’air marqué, mais très concentré, les ventilateurs de plafond créent un mouvement d’ensemble doux et régulier, qui enveloppe les occupants. Autrement dit, une brise constante, plutôt qu’une bourrasque.
Inclus dans MaPrimeRénov’
Signe de l’intérêt de ces équipements : début 2024, les pouvoirs publics les ont intégrés dans le dispositif de subventions MaPrimeRénov’, qui s’apprête à être suspendu pour l’été. Dans les départements d’outre-mer, d’autres aides financières existent depuis plus longtemps.
La solution n’est pas miraculeuse pour autant. « Équiper un bâtiment vitré et sans protection solaire reviendrait à placer une emplâtre sur une jambe de bois », ironise Robert Célaire. Il rappelle que la lutte contre la surchauffe des bâtiments doit commencer par une bonne isolation de la toiture et une protection contre le rayonnement solaire (végétation, brise-soleil ou volets occultants devant les fenêtres les plus exposées).
Lorsque le ventilateur de plafond ne suffit pas, il peut aussi servir en complément d’une climatisation, pour la soulager. Il permet de retarder son allumage, par exemple en début de saison chaude, et ensuite de relever la température de consigne, pour un fonctionnement moins énergivore.
Malgré ses atouts, cet équipement reste confidentiel en France hexagonale. Selon l’AFPVP, le taux d’équipement des logements avoisine 2,5 %, contre 20 à 30 % dans les départements d’outre-mer et plus de 60 % aux États-Unis.
« De gros progrès ont été faits sur le design »
Son développement est freiné par une image passéiste : certains y voient une « clim du pauvre » ou rechignent à adopter un équipement jugé peu esthétique. L’offre est pourtant bien plus variée et séduisante que ce que l’apparence des modèles premier prix peut laisser penser : pales au profil travaillé, différents matériaux…
« De gros progrès ont été faits sur le design des appareils ces dernières années », commente Pierre Lacarrière, président de l’AFPVP. Il existe même des modèles sans pales qui, en quelque sorte, aspirent l’air, au lieu de le pousser. Mais ils ne font pas l’unanimité : « Ils sont plus chers à l’achat, plus consommateurs d’énergie et procurent un confort moindre », estime Robert Célaire.
L’installation dans les logements peut cependant parfois se heurter à un obstacle très concret : la hauteur sous plafond. Dans les maisons et appartements, elle est le plus souvent de 2,50 m. Or, pour des raisons de sécurité (le risque de heurter les pales en mouvement), la préconisation habituelle est de laisser 2,30 m (parfois 2,20 m) entre le sol et les pales. Seuls les modèles les plus plats (20 ou 30 cm maximum entre le plafond et les pales) permettent de respecter la règle. Par ailleurs, l’appareil doit être solidement fixé au plafond, avec au moins deux points d’ancrage.
Moins bruyant qu’un ventilateur sur pied
Les modèles de grandes marques coûtent rarement moins de 500 euros, prix auquel il faut ajouter 100 à 200 euros si l’on souhaite le faire poser par un professionnel (un électricien, généralement). Des modèles bien plus abordables (moins de 200 euros, parfois même moins de 100 euros), souvent couplés à un éclairage, existent en magasins de bricolage et sur le web.
Les risques de déception existent, notamment si l’on ne prend pas garde au diamètre. De nombreux premiers prix ne dépassent pas 60 à 80 cm. De quoi laisser augurer d’un débit d’air trop limité et trop mal réparti pour offrir un rafraîchissement satisfaisant. Même pour un petite pièce comme une chambre (10 m2 ou moins), l’AFPVP préconise un modèle de 107 à 132 cm de diamètre. Au-delà de 20 m2, elle conseille d’en installer plusieurs.
L’organisme met aussi en garde contre les grands sites de vente en ligne, qui abritent de nombreux revendeurs tiers : « Certains d’entre eux se contentent de faire livrer directement les produits d’Asie, selon le principe du dropshipping, sans assurer aucun service après-vente, déplore Jean-Pascal Schaeffer, délégué général de l’AFPVP. On trouve parfois des modèles présentant des défauts de sécurité électrique, et d’autres équipés d’une lampe LED qui ne peut pas être remplacée. »
Dernier critère de choix : le niveau sonore. Le dispositif MaPrimeRénov’, qui avait fixé des critères de performance, n’accordait de subventions qu’aux modèles de puissance acoustique limitée à 45 dB à vitesse maximale (soit le niveau sonore d’un lave-vaisselle) et 35 dB à vitesse minimale. Hélas, les sites de vente n’indiquent pas toujours cette caractéristique. Mais même en dépassant un peu ces niveaux, un ventilateur de plafond reste bien moins bruyant qu’un ventilateur sur pied… et que la plupart des climatiseurs.

– © Étienne Gendrin / Reporterre
Lire l’article sur Reporterre.net
Vous pouvez retrouver l’article complet : https://reporterre.net/Face-a-la-canicule-la-solution-du-ventilateur-de-plafond